BIEN-ÊTRE ET SANTÉ DÉCRYPTÉS

Orthorexie : le trouble alimentaire qui monte en silence

Anorexie, boulimie… ces mots-là sont passés dans le langage courant. On les connaît, on les identifie, parfois sans en saisir tous les mécanismes.

Mais orthorexie ? Le mot reste encore discret. Pourtant, il décrit une réalité de plus en plus visible : l’obsession de manger « sain ».

Sur les réseaux sociaux, cette quête de pureté alimentaire est devenue une norme silencieuse, portée par des comptes bien-être, des challenges détox et des conseils santé omniprésents. À force de traquer chaque additif, de scanner chaque produit et de transformer le moindre repas en analyse, ce mot risque de devenir incontournable dans les années à venir. 


Que signifie le mot orthorexie ?

Le terme « orthorexie » a été proposé en 1997 par un médecin américain, Steven Bratman. Il combine orthos (droit, correct) et orexis (désir, appétit).

L’idée : vouloir manger le plus sainement possible, en suivant des critères personnels souvent très rigoureux, éviter tout ce qui semble mauvais, toxique, douteux… jusqu’à en faire une ligne de conduite rigide, très contraignante.

Ce n’est pas une volonté de maigrir.

Ce n’est pas une diète passagère.

C’est une forme de contrôle dans laquelle chaque ingrédient est analysé, chaque plat interrogé, chaque repas devient source de réflexion… voire d’angoisse.

Ça vous rappelle quelque chose ? 



Ce que disent les études

Une étude française publiée dans La Presse Médicale (2022) estime que jusqu’à 28 % des adultes pourraient présenter des formes partielles ou non spécifiées de troubles alimentaires, parmi lesquels l’orthorexie. Loin d’être marginal, ce phénomène se développe dans un climat dans lequel tout pousse à la méfiance : composition des produits, industrie agroalimentaire, scandales sanitaires…

Autre donnée frappante : une étude de 2017 (eh oui !), parue dans Eating and Weight Disorders, a révélé que près d’un utilisateur d’Instagram sur deux suivant des comptes « alimentation saine » montrait des signes d’orthorexie.


Un mot encore peu connu, mais pour combien de temps ?

Aujourd’hui, le mot « orthorexie » n’a pas encore la notoriété de l’anorexie ou de la boulimie. Il ne figure pas encore systématiquement dans les dictionnaires usuels, il ne s’affiche pas dans les médias généralistes.

Et pourtant, il décrit une tendance croissante, alimentée par des discours sur le « mieux manger », des applications comme Yuka ou Open Food Facts qui notent les aliments, et une culture croissante de la pureté alimentaire. Sans compter le rôle des influenceurs… et les manipulations des vendeurs de bien-être

Lire les étiquettes, éviter les plats tout prêts, faire attention à ce que l’on mange n’a rien de problématique. Mais, quand cela devient une source de tension permanente, que l’on élimine des groupes entiers d’aliments sans justification médicale, que manger hors de chez soi devient difficile : le mot orthorexie commence à faire sens.

L’orthorexie n’est hélas pas encore reconnue comme un trouble du comportement alimentaire (TCA) dans les classifications médicales officielles (DSM-5, CIM-11). Toutefois, ce trouble fait l’objet de recherches de plus en plus nombreuses, en raison de son impact potentiel sur le quotidien et la santé.


Pourquoi ce mot mérite d’être mieux connu ?

Parce qu’il met un nom sur quelque chose que l’on vit sans forcément le voir venir.

Parce qu’il permet de poser un cadre à une attitude qui semble, au départ, pleine de bonnes intentions.

Parce qu’il nous rappelle qu’un comportement valorisé (le « manger sain ») peut rapidement conduire à une forme de rigidité, voire, évoluer vers un véritable trouble du comportement alimentaire.

Si vous connaissez quelqu’un dont les habitudes deviennent excessivement strictes ou isolantes, mieux vaut rester attentif : sans forcer, mais sans banaliser non plus. Comme l’anorexie, ce type de trouble peut s’installer de manière progressive et silencieuse, sans que la personne concernée en ait pleinement conscience.

Et parce qu’au rythme où vont les choses – entre les conseils nutritionnels permanents, les injonctions à se purifier et les tendances extrêmes sur les réseaux sociaux – ce mot pourrait bien progressivement se généraliser dans les années à venir.

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