
Acrasie (Akrasia) : Et si vos échecs avaient enfin une explication ?
Vous savez que fumer tue, pourtant vous allumez une cigarette.
Vous connaissez les bienfaits du sport, mais vous restez dans le canapé.
Vous voulez économiser, mais vous craquez sur cet achat inutile.
Vous reportez ce dossier important pour scroller sur votre téléphone.
Bienvenue dans le monde de l’akrasia (acrasie).
Aristote avait tout compris
Il y a 2400 ans, Aristote a forgé ce terme pour désigner cette bizarrerie fondamentalement humaine : agir contre son propre jugement. (Du grec ancien ἀκρασία, « absence de maîtrise de soi ».)
Littéralement « absence de maîtrise de soi », l’acrasie va bien au-delà d’un simple manque de volonté. C’est cette guerre civile permanente entre le « moi rationnel » qui planifie et le « moi impulsif » qui agit.
Le philosophe grec s’opposait ainsi à son maître Socrate, qui pensait qu’on ne pouvait pas mal agir en connaissance de cause. Pour Socrate, le mal venait de l’ignorance : si on connaît le bien, on le fait forcément.
Aristote l’a contredit avec génie : on peut parfaitement connaître le bien et choisir le mal. Révolutionnaire à l’époque, évident aujourd’hui.
La science d’aujourd’hui confirme Aristote
Les neurosciences modernes donnent raison à Aristote.
Notre cortex préfrontal gauche – siège de la logique et de la planification – est constamment en lutte contre notre cerveau droit émotionnel et notre système limbique primitif.
Le cerveau gauche calcule, analyse, prévoit. Le cerveau droit ressent, désire, agit impulsivement.
Et devinez qui gagne le plus souvent ?
Cette dualité neurologique explique pourquoi nous sommes littéralement habités par deux personnes qui se détestent.
L’une sait ce qu’il faut faire, l’autre fait ce qu’elle veut.
L’acrasie, c’est le triomphe systématique de notre côté primitif et émotionnel sur notre sagesse rationnelle.
L’acrasie explique pourquoi les bonnes résolutions échouent, pourquoi on procrastine, pourquoi l’enfer est pavé de bonnes intentions. C’est peut-être le concept le plus utile de toute la philosophie antique pour comprendre nos comportements modernes.
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, reconnaître son acrasie n’est pas un aveu de faiblesse, mais un acte de lucidité. Cela permet de prendre du recul : « Ah, c’est mon acrasie qui parle » au lieu de « je suis nul, je n’ai aucune volonté. »
Comment utiliser les termes acrasie ou akrasia ou akrasique
- « Je suis victime d’acrasie » quand vous agissez contre votre propre intérêt
- « C’est de l’acrasie pure » pour décrire un comportement irrationnel
- « Mon acrasie me conduit à… » quand vous cédez à l’impulsion
L’adjectif s’écrit akrasique et non acrasique… Néanmoins, ces mots n’existent pas dans les dictionnaires. On le trouve dans des ouvrages académiques, encyclopédies ou lexiques de philosophie.
L’akrasia ou acrasie moderne
À l’ère des réseaux sociaux, des notifications permanentes et de la consommation à outrance, l’acrasie n’a jamais été autant exploitée.
Nos environnements modernes abusent systématiquement cette faille de notre cerveau reptilien pour nous tenter… et ça marche !
Comment lutter contre l’acrasie ?
Puisque l’acrasie est un conflit neurologique, il faut ruser avec son cerveau. Exactement comme pour une addiction… Mais, oui, c’est difficile.
✅ Quelques stratégies éprouvées
- Éliminer les tentations de votre environnement (impossible de manger des chips si vous n’en achetez pas),
- Utiliser des « contrats avec soi-même » (paris publics, applications de blocage),
- Fractionner les tâches difficiles en micro-actions de 2 minutes (voir le bonus en fin d’article),
- Et surtout, prévoir vos moments de faiblesse pour les anticiper.
L’idée ? Donner un avantage tactique à votre cerveau gauche rationnel sur votre cerveau droit impulsif.
Aristote nous offre ainsi un miroir troublant : l’acrasie révèle que nous sommes fondamentalement humains, et que la condition humaine elle-même est un perpétuel combat entre ce que nous savons et ce que nous faisons.
Alors, la prochaine fois que vous cédez à une impulsion contre votre meilleur jugement, pensez à Aristote. Il vous comprendrait parfaitement. Et maintenant, vous avez quelques armes pour riposter !
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🌟🌟🌟 Bonus : la technique des micro-actions
L’idée : au lieu d’affronter une grosse tâche intimidante (qui déclenche votre acrasie), vous la découpez en mini-étapes de 2 minutes maximum.
Exemple concret :
- Tâche intimidante : « Rédiger un rapport de 20 pages »
- Fractionnement :
- « Ouvrir un document Word » (30 secondes)
- « Écrire le titre » (1 minute)
- « Lister 3 points clés » (2 minutes)
- « Rédiger la première phrase d’intro » (2 minutes)
- etc.
Pourquoi ça marche ? Votre cerveau droit émotionnel panique devant « 20 pages à rédiger » mais ne voit aucun danger dans « ouvrir Word ». Une fois lancé, l’inertie joue en votre faveur, souvent vous continuez au-delà des 2 minutes.
Dans le même esprit, connaisez-vous les termes :
🔗 Apparatchik 🔗 Bigorexie 🔗 Orthorexie 🔗 Agnostique 🔗 Etc.
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