
Le mot du jour : Slutshaming
Le slutshaming, tu connais ? Si tu lis ces quelques lignes, c’est sûrement que, tout comme moi, tu ne savais pas vraiment ce que ça voulait dire.
Hier, j’ai regardé la dernière série de Netflix : De rock star à tueur. Beaucoup se souviennent du chanteur du groupe Noir Désir, Bertrant Cantat condamné pour avoir tué Marie Trintignant en 2003.
À l’époque, Noir Désir, c’était le groupe le plus adulé de la scène rock française. Inclassable, engagé, respecté dans tous les milieux. Il bénéficiait, disons-le, d’une forme d’aura presque intouchable. Un statut qui le mettait à l’abri des critiques les plus frontales.
Au cours du reportage, une journaliste a mentionné le fait, qu’à l’époque, Marie Trintignant avait fait l’objet de « slutshaming. » Compte tenu du contexte, j’en ai compris le sens. Mais, je me suis dit que ce serait utile de m’attarder un peu sur ce mot afin de mieux en saisir la portée. Parce que derrière ce terme, il y a une réalité bien connue, trop banalisée, et d’une violence silencieuse.
Que signifie « faire l’objet de slutshaming ? »
« Faire l’objet de slutshaming », c’est être publiquement critiquée, jugée ou ridiculisée à cause d’un comportement sexuel perçu comme « trop libre ». Il peut s’agir de remarques sur la manière de s’habiller, sur le nombre de partenaires, sur des propos jugés trop explicites ou tout simplement sur une attitude perçue comme trop assumée.
L’expression vient de l’anglais :
– slut : un mot d’argot très péjoratif, généralement traduit par « salope », utilisé pour parler d’une femme supposée avoir une vie sexuelle trop active
– shaming : le fait de faire honte publiquement.
À la base, le terme « slutshaming » décrit un mécanisme social qui consiste à faire honte à une personne à partir de jugements moraux liés à la sexualité. Quand on dit que quelqu’un en a fait l’objet, cela signifie qu’il ou elle a été publiquement exposé(e) à ce type de critiques ou moqueries.
Ce type de traitement vise majoritairement des femmes, mais peut aussi concerner des hommes. Il se manifeste dans les médias, sur les réseaux sociaux, ou dans la vie quotidienne.
Exemples concrets
Marie Trintignant
Après sa mort, certains commentaires ont porté non pas sur les violences qu’elle avait subies, mais sur sa vie sentimentale. On a évoqué ses relations passées, comme si cela pouvait entacher son image ou amoindrir la gravité des faits. Le fait qu’elle ait été en couple avec plusieurs hommes connus du milieu artistique a servi à alimenter un récit insidieux, suggérant qu’elle était instable ou « excessive » dans sa vie privée. Des remarques qui n’avaient rien à voir avec l’affaire, mais qui trahissaient une volonté de discréditer une femme en s’attaquant à sa vie intime..
Camille Lellouche
Elle a reçu des critiques pour ses sketchs, dans lesquels elle parle librement de sexualité, d’attirance ou de relations intimes. Certains extraits, diffusés sur les réseaux sociaux, ont suscité des réactions la jugeant « trop crue » ou « pas assez féminine ». Ces remarques ne concernaient pas le contenu humoristique en soi, mais le fait qu’une femme puisse parler de ces sujets sur un ton direct, sans euphémisme, dans un cadre public. Elle a ainsi fait l’objet de slutshaming pour avoir simplement utilisé son propre vécu dans un registre comique.
Amber Heard
Lors du procès qui l’opposait à Johnny Depp, de nombreux messages sur les réseaux sociaux se sont concentrés sur sa vie intime plutôt que sur les faits juridiques. Des vidéos laissaient entendre qu’elle avait eu plusieurs relations amoureuses après sa séparation, et ces éléments ont été utilisés pour discréditer son témoignage. On la décrivait comme manipulatrice ou instable, en s’appuyant sur des suppositions liées à sa vie sentimentale. Elle a donc fait l’objet de slutshaming à travers des attaques centrées non sur les faits jugés, mais sur la perception de sa sexualité.
Madonna
Depuis les années 80, elle fait régulièrement l’objet de slutshaming, à cause de son image publique et de ses choix artistiques. Ses clips ont souvent été jugés provocateurs, notamment ceux mêlant sexualité et symboles religieux. À plusieurs reprises, elle a été critiquée pour avoir continué à s’exprimer librement sur ces sujets en vieillissant. Des commentaires récurrents évoquent le fait qu’elle « ne devrait plus » s’habiller ou danser de cette façon à son âge. Ces réactions relèvent du slutshaming car elles lient l’acceptabilité de son comportement à des normes morales liées au genre, à la sexualité et à l’âge.
Ce qu’il faut retenir
Dire qu’une personne a fait l’objet de slutshaming signifie donc qu’elle a été publiquement visée par des critiques ou des jugements portant sur sa liberté sexuelle, son apparence ou son attitude. L’expression sert aujourd’hui à désigner ce type de traitement dans les médias, sur internet ou dans les discussions courantes.
Finalement, reconnaître le slutshaming, c’est aussi s’interroger sur notre façon de parler des autres, pour ne pas reproduire cette violence ordinaire.
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